André DELUOL

(1909-2003)

Aux confins de l'Ile-de-France, en bordure de la Beauce, dans un vallon tranquille et vert - la gare la plus proche est à 5 kilo-mètres et le car ne passe plus - dort un hameau d'une vingtaine d'habitations paysannes : vingt toits de tuile, autant de simples façades... L'une d'elles cependant s'orne d'une niche qu'ha-bite une statue moderne, souple et puissante à la fois : c'est la maison de Deluol, « un monsieur sculpteur », comme a dit le paysan qui l'a indiquée à l'auteur de ce texte.

Andre Deluol : un des plus jeunes représentants de l'art actuel, et peut-être un des meilleurs, parce que en dehors de toute école, un indé-pendant et, si l'on n'avait quelque peu abusé du terme, on dirait : un autodidacte.

Originaire de Valence, il gagna tout jeune Paris pour y étudier la peinture et entra à l'Ecole -des beaux-arts, mais l'enseignement académique -ne convenait guère à son caractère... Ce débutant voulait d'emblée s'attaquer aux grands -problèmes de son art, la question du relief, en particulier, le tracassait ; et pour la résoudre
il voulut, dès qu'il sut tenir un pinceau, essayer quelques recettes personnelles ; élèves et pro-fesseurs vinrent alors voir sur son chevalet comment on pouvait devenir victime de la troisième dimension !

Ce fut un tollé général, mais ce fut aussi pour Deluol l'occasion de comprendre qu'il n'avait peut-être pas « pris la bonne voie ».
Il fit alors l'achat d'outils de sculpteur et, -bravement, se mit à tailler la pierre.

Tels nos imagiers du moyen âge, qui auraient été bien surpris d'entendre parler de modelage, il n'eut pas un instant l'idée de travailler d'abord le plâtre ou la glaise...
« Tout ce que je connaissais de beau dans les musées, dit-il, tout ce que je voyais sur les façades des monuments, aux porches des cathédrales, tout ce qui avait bravé les siècles et la critique de l'homme n'était que le produit de la taille directe.

En Grèce, c'est Phidias qui donna le signal de la décadence en abandonnant ce procédé ; et s'il s'en tira avec honneur, c'est parce qu'il avait commencé par là alors que ses disciples et successeurs tombèrent vite dans le naturalisme... L'art suprême n'est pas de copier la nature.
« Un phénomène inverse se produisit dans la Rome païenne du début de l'ère chrétienne : les sculpteurs, bien qu'en possession d'une tech-nique éblouissante, piétinaient pendant que dans les catacombes des hommes simples, dépourvus de toute culture artistique, se mettaient à tailler la pierre pour faire de leurs propres mains cette croix qui dominerait leur autel, ce poisson qui l'ornerait... Ils osèrent s'attaquer à la matière, et ce fut la naissance de l'art chrétien, avec toutes les cathédrales en puissance dans leur ciseau. Seule la taille directe permet de vaincre la diffi-culté que rencontre l'esprit lorsqu'il s'agit de tracer sa pensée dans le solide ».

Et Deluol conclut : « Si nous voulons connaître une renaissance de l'art, je dirai qu'il faut rejeter toute la technique actuelle et suivre l'exemple de nos ancêtres.  »

Pierre ou bois, il n'a pas de préférence. Les transports de matériaux s'avérant à peu près impossibles, il se contente des ressources locales...

Un jour il rapportait, triomphant, une vieille pierre tombale abandonnée en bordure du cime-tière ; quelques semaines auparavant il exposait chez son ami Adnet deux statues qui avaient pris naissance dans une bordure de trottoir en granit.

Mais, évidemment, il préfère le marbre.
Il a quitté son atelier de Paris pour une maison de paysan achetée peu de temps avant la guerre. Sans rien lui enlever de son carac-tère rustique il l'a « appropriée » à ses besoins. Un appentis lui sert d'atelier ; mais sept mois sur douze il travaille en plein air (c'est un des avantages de la taille directe) et laisse la dernière couvée, mi-poules mi-canards, occuper seule l'atelier.
 Et ce n'est pas un des moindres attraits de cette demeure que de côtoyer tant de bêtes que l'on a peu l'habitude de voir aussi familières... et qui ne respectent pas toujours les sculptures répandues partout au hasard de la fantaisie de l'artiste ; et n'est-ce pas au contact de toute cette vie que l'oeuvre de Deluol doit d'être si humaine ?

L'amour de la vie, il se manifeste en effet dans sa maison comme en son oeuvre : le grenier lui sert de salon, de chambre d'apparat et de fruitier ; en fait, c'est la pièce d'un pirate !

Ici sont accro-chés les souvenirs de voyages, là les reliques du passé ; les oripeaux du rêve voisinent, sans aucune gêne, avec les instruments de la réalité. Nul snobisme dans cet assemblage, mais la marque d'un esprit curieux et avide de nouveauté. Sa sculpture n'est-elle pas d'ailleurs une expres-sion de mouvement ?.

Mais de l'homme et de son oeuvre on a déjà beaucoup parlé. Les uns ont pensé « Renaissance », d'autres ont cité Carpeaux ! Disons simplement que c'est un bel artiste qui travaille en accord avec le ciel de l'Ile-de-France !

 

Sources : Images de France N° 106 de Mars 1944

Texte : pierre Noiraye
Photos : Jahan

 

 

 

 

 

19 novembre 2007, par E.GEORGE : "J'ai hérité d'une sculpture d'André Deluol : Isadora réalisée en 1992 à 250 exemplaires pour DAUM, pouvez-vous m'indiquer sa valeur, (la sculpture est numérotée) Merci d'avance."

     26 novembre 2007, par deluol dit genest (3001 odyssée) : "cette sculpture réalisée en pâte de verre est très recherchée (elle est aujourd'hui introuvable !) vous avez de la chance ! estimation entre 3000 et 5000 euros semble-t-il ; Voir sur andré deluol in mon site à deluol dit genest (ou 3001 odyssée)."

 

18 septembre 2005, par sisteron christian :"je viens d'hériter d'une sculpture de deluol en pate de verre numerotee et signee daum j'aimerai avoir la date de sa créaton et si possible une idee de sa valeur merci"